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Bioaccumulation de substances chimiques dans les eaux superficielles : l’encagement de gammares calibrés

Pour répondre à la Directive Cadre européenne, une nouvelle méthode a été développée pour mesurer la bioaccumulation des substances chimiques dans les invertébrés aquatiques.

Une exigence de la Directive Cadre Européenne

Une directive cadre européenne de 2008 (modifiée en 2013) établit des normes de qualité environnementale (NQE) pour la surveillance des polluants prioritaires dans les milieux aquatiques. Il s’agit de rechercher les polluants bioaccumulés dans les organismes aquatiques (poissons et invertébrés).

Deux approches peuvent être utilisées :

  • les approches passives s'appuient sur le prélèvement ou la collecte d’organismes autochtones sur la station de mesure. Elle permettent de vérifier la conformité des biotes prélevés vis-à-vis de NQE (Normes de Qualité Environnementales) applicables dans cette matrice et d’évaluer un risque envers les prédateurs supérieurs et/ou l’Homme par l’ingestion de proies/produits de la pêche contaminés

  • les approches actives reposent sur la transplantation, par encagement, d’organismes provenant d’une population source de référence. Elles permettent d’améliorer la comparabilité des résultats et de fiabiliser leur interprétation en termes de tendances.

La France a décidé de suivre les deux approches : collecte de chair de poisson pour l’approche passive, et encagement de gammares pour l’approche active.

Une méthode issue de la recherche

La méthode d’encagement de gammares est issue de 10 années de recherche d’IRSTEA. Elle est développée par la société BIOMAE (Spinoff du laboratoire d’écotoxicologie d’IRSTEA), et a fait l’objet de tests à grande échelle en partenariat avec Aquabio qui a pu apporter son expérience de terrain. La méthode, en cours de normalisation, prévoit plusieurs étapes :












Figure 1 : Du prélèvement des gammares jusqu’à l’exposition in situ dans les cours d’eau (Biomae)

  1. Prélèvement de gammares dans une station de référence ou une population source : BIOMAE possède une ancienne cressonnière dans laquelle il assure l’élevage d’une population homogène. Deux espèces peuvent être utilisées : Gammarus pulex et Gammarus fossarum.

  2. Stabulation et calibration en laboratoire. Les organismes sont maintenus pendant 7 jours dans des conditions contrôlées pour la température, la conductivité, l’oxygène, l’alimentation et photopériode. Puis une sélection des individus est opéré pour obtenir des mâles d’une taille et d’un poids homogène.

  3. Encagement pendant 21 jours dans le milieu. Les individus calibrés sont introduits dans des cages ajourées permettant les échanges avec le milieu, puis acheminés sur la station de mesure dans des conditions ambiantes contrôlées (température, oxygène dissous). Ils sont déposés dans une zone profonde et lotique, pendant 21 jours.
    A la fin de la durée d’exposition, ils sont réacheminés vers le laboratoire en les maintenant dans l’eau issue de la rivière.

  4. Conditionnement avant analyses. Au laboratoire, les individus morts ou moribonds sont comptabilisés et retirés. Les gammares survivants sont congelés et envoyés au laboratoire d’analyse pour recherche des contaminants métalliques et organiques.

    Les concentrations biodisponibles brutes des 250 molécules obtenues peuvent ensuite être interprétées en fonction du niveau de contamination par rapport à un référentiel Irstea / Biomae construit au niveau français ou du niveau de contamination par rapport aux NQE fixées par l’Union Européenne.

Une méthode aux applications multiples

Le même bioessai peut également être utilisé, au-delà de la DCE, pour évaluer la biotoxicité dans le cadre de suivi en milieu naturel : amont-aval rejet industriel , amont-aval déversoir d’orages, avant-après une interaction sur le milieu naturel (lâcher de barrage, travaux, etc.).
D'autres bioessais sont également pratiqués par Biomae pour évaluer le niveau de toxicité de l’ensemble des micropolluants présents dans le milieu récepteur par implémentation (alimentation, neurotoxicité, reprotoxicité et perturbation endocrine).


Conseil d'expert
La bioaccumulation est l'absorption de substances chimiques, présentes dans l'environnement, et leur concentration dans certains tissus par les organismes. La biodisponibilité désigne la fraction d'une substance ayant la possibilité d'être absorbée et d'être utilisée par le métabolisme d'un organisme vivant.
 

Pour aller plus loin...
- Téléchargez la Note technique du 26 décembre 2017 relative à la mise en œuvre du suivi des substances de l’état chimique des eaux de surface dans le biote dans le cadre de la directive cadre sur l’eau conformément à la directive 2013/39/UE du Parlement européen et du Conseil du 12 août 2013
- Site internet BIOMAE


Contacts
Laurent Viviani (Co-fondateur Biomae) - laurent.viviani@biomae.fr
Bruno Fontan (Directeur Technique d'Aquabio et membre commission AFNOR T95E Biosurveillance de l'environnement ) - bruno.fontan@aquabio-conseil.com



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